Lundi 11 juillet 2011, 4h15 du matin, le réveil sonne … Voilà des mois que je rêve de cet instant, et le voilà enfin arrivé ! Aujourd’hui, c’est l’étape du Tour Acte 1, entre Modane et l’Alpe d’Huez. Il ne faut pas traîner, le départ est à 7h et je loge à Valloire, en plein au milieu du parcours, à 40 minutes de routes de Modane. La tension monte …
Un départ en boulet de canon
Arrivé sur le lieu avec un peu d’avance, il est déjà trop tard pour se garer à moins de 5 kilomètres de la ligne. Pas d’inquiétude, nous avons nos vélos, et cela fera un bon échauffement. Me voilà donc fin prêt, en compagnie de mon coéquipier du jour Mickaël, à affronter les 109 kilomètres au programme.
J’ai le privilège d’avoir un bon dossard qui me permet de prendre place dans le premier sas. Arrivé un peu tard, je me retrouve malheureusement assez mal placé, en 500ème position au moins … Ce n’est pas grave, je sais que ça va partir fort, mais je suis prêt mentalement à frotter. J’ai la bonne surprise de retrouver autour de mois quelques gars du Nord, qui m’ont fait bien mal aux jambes lors des Boucles Tourrangelles et des Routes de l’Oise …
A 7h05 environ, le départ est donné. Il me faut au moins une minute trente avant de pouvoir passer l’arche, et c’est parti à bloc. Les 15 premiers kilomètres sont en légère descente, et le 52×12 est tout de suite mis à contribution. Je suis rapidement doublé par un rouleur que je connais bien puisqu’il court dans le Nord. Je saute dans sa roue et remonte le peloton géant à toute allure.
Il y a déjà quelques cassures, et il faut se mettre à la planche pour boucher les trous. A l’entrée dans Saint Michel de Maurienne, j’atteins enfin les 100 premières places. Mon compteur n’est pas descendu une seule fois en dessous de 50 km/h pendant cette première partie de course !
L’enchaînement Télégraphe et Galibier : facile !
Dans ce petit village montagnard, je sais que le profil va d’un coup se durcir. En effet, un virage à angle droit sur la gauche nous fait attaquer la première difficulté du jour, le col du Télégraphe. J’ai déjà monté ce col la veille en guise d’échauffement, et je sais qu’il n’est pas trop compliqué.
Le rythme est très soutenu, et le premier kilomètre est avalé à plus de 28 km/h, entraîné par ce peloton de fou furieux. Je décide rapidement de calmer le jeu et de me caler à mon rythme. A ma grande surprise, je me fais assez peu doubler, et j’arrive à grimper ce col entre 16 km/h et 20 km/h, en veillant à ne pas mettre mon cœur en sur-régime.
Ce premier sommet est déjà avalé, et une courte descente très roulante nous permet d’arriver sur Valloire, au pied du mythique Galibier.
A partir de ce moment, j’entre dans l’inconnu, puisque je n’ai jamais roulé sur ces routes. La descente sur Valloire ne m’a pas permis de vraiment récupérer, et les cuisses sont un peu lourdes dans le premier kilomètre du Galibier, plutôt sévère. Heureusement, la pente se radoucit ensuite, et je sprint pendant 400 mètres pour rattraper le gros groupe qui se constitue devant moi.
Les pourcentages sont faibles, et je dois m’accrocher pour ne pas lâcher prise. Un coup d’œil un peu plus haut, et j’aperçoit un autre groupe assez important, avec devant lui, les voitures et moto ouvreuses ! Incroyable, je suis encore dans le coup ! Cette perspective me redonne un peu de motivation au moment où nous arrivons dans la partie dure du Galibier. Les paysages sont superbes, mais je ne prend pas le temps de les contempler. Je reste concentré sur mon effort, et rattrape quelques coureurs qui m’avaient doublé quelques kilomètres plus bas.
Le dernier kilomètre de ce géant des Alpes est terrible, avec une pente à plus de 10 %. Je serre les dents pour en finir, et bascule dans les 100 premiers. J’attaque la descente à fond, et rate mon premier virage. Ça commence bien ! Heureusement, la suite se passe mieux, et j’enchaîne les virages à toute vitesse. La montagne, c’est vraiment grisant !
Une erreur stratégique qui coûte cher
Avant le départ, j’avais planifié de m’arrêter à un ravitaillement au bas de la descente du Galibier. Voyant que mes bidons sont presque vides, j’applique mon plan à la lettre, et laisse filer le bon groupe qui s’était reformé. Le temps de remplir mes deux grands bidons, je vois passer deux autres groupes d’une quinzaine de coureurs. Au moment de repartir, un troisième groupe plus conséquent arrive à toute vitesse. Je relance de toutes mes forces, mais je me retrouve 200 mètres derrière.
Le vent est en pleine face et le profil en faux plat descendent, c’est à dire pas vraiment favorable vu ma situation. Je bataille pendant 5 minutes pour essayer de revenir, mais je ne gagne pas de terrain. La mort dans l’âme, je me relève pour attendre le groupe suivant …
Rapidement, je vois revenir sur moi 4 hommes … et c’est tout ! J’espérais un plus gros paquet pour pouvoir me reposer un peu, mais là, il va falloir tourner ! Effectivement, je comprends vite que ces 40 kilomètres de vallée vont me coûter cher. Notre petit groupe roule vite, et il faut prendre de gros relais qui me pèsent lourds dans les jambes. Je n’arrive pas à assumer tous mes relais, ce qui a pour effet d’énerver les deux plus forts qui roulent à fond !
Après une poursuite acharnée, nous revenons sur le groupe que j’avais loupé à la sortie du ravitaillement. Quelle débauche d’effort. A 10 secondes près, j’aurais pu éviter tout ça … Au moment où nous rentrons sur ce groupe, un panneau nous indique que Bourg d’Oisans n’est distant que de deux kilomètres. C’est bien peu pour récupérer …
L’Alpe d’Huez, c’est dur …
Ça y est, nous y sommes. Un mur se présente sous nos roues pour affronter l’Alpe d’Huez. Il reste 14 kilomètres de montée, et je sens tout de suite que mes efforts de la vallée me pèsent. Je suis littéralement planté sur ces rampes à 10 %, et je dois me faire violence pour ne pas poser le pied à terre. Mon 39×25 me paraît énorme, et je suis vraiment à la peine.
Je parviens heureusement à stabiliser mon rythme, mais je me fais doubler par de nombreux concurrents, qui grimpent plus en souplesse que moi. A 5 km du sommet, je retrouve quelques sensations, et en profite pour accélérer le rythme. Ce regain de forme me permet de repasser quelques coureurs, mais je n’avance pas bien vite.
Je sais que le dernier kilomètre est plat, et je me livre à fond à partir du panneau qui m’indique l’arrivée à 3 km. Je sens les crampes venir, mais je tiens bon.
Enfin ! Le sommet est en vue, et j’attaque une portion moins difficile accompagné de 2 autres coureurs. Nous arrivons dans une petite descente, et il faut repasser le grand plateau. Voilà le dernier virage sur la gauche, que j’aborde en dernière position. Il ne reste plus qu’à sprinter jusqu’en haut de ce dernier talus. J’arrache littéralement mes pédales, et prend vite l’ascendant sur ces deux derniers concurrents. Je jette mes dernières forces dans ce sprint, et passe la ligne en 4h20, complètement épuisé. Il me faudra plusieurs minutes pour me remettre de ce dernier effort violent.
Le résultat tombe quelques heures plus tard : 137ème ! C’est une très bonne performance, incroyable même au regard de mon début de saison. J’explose mon record sur cette course (290ème au Ventoux en 2009). Je suis vraiment satisfait de cette place, compte tenu du temps que j’ai perdu dans la vallée.
A y regarder de plus près, j’aurais mieux fait d’attendre le pied de l’Alpe, ou un ravitaillement en haut nous attendait. Cela m’aurait certainement permis d’intégrer le top 100. Peut-être l’année prochaine …
chapeau ! très belle performance !
Merci Florent. Je te souhaite le même succès sur la Haute Route !
Merci pour cette belle description de l’étape que j’ai lue tout en suivant le tracé sur Google Earth. Comme quoi, 10 secondes peuvent compter énormément en vélo ! Passionnant !
Merci c’est sympa ! Comme tu dis, 10 secondes peuvent couter cher en vélo … Mais bon, je suis quand même content, c’était carrément inespéré comme résultat !
Félicitations pour cette très belle perf et pour ce récit captivant qui réussit à nous faire vivre ta course de l’intérieur. On a souffert avec toi 😉
Merci Nico, ça fait plaisir de voir que je t’ai fais vibrer … lol !